CANETON FOUINEUR

La sobriété énergétique selon Leila Benali

Des bonus et une panne d’idées
Saliha Toumi
10/11/2022 0:46
Leïla Benali, ministre de la Transition énergétique et du Développement durable.

A quoi bon lancer une récompense pour les bons élèves de la consommation énergétique dans un pays où le gros des citoyens fait depuis...

Le ministère de la Transition énergétique et du Développement durable a eu une idée lumineuse:  offrir  un bonus aux Marocains qui auront fait preuve de sobriété électrique dans leur consommation pendant les mois de novembre et décembre. Les bons élèves dans ce domaine se verront gratifier, en comparaison avec leur consommation en 2021 à la même période, d’un bonus proportionnel à l’économie réalisée.    

Calqué sur la stratégie marketing adoptée par les entreprises pour fidéliser leurs clients  en leur promettant des petites babioles à gagner, le  projet a été exposé par la ministre de tutelle, la très éclairée Leila Benali en dernier conseil de gouvernement, avant de faire l’objet d’un communiqué émis par son département où il est indiqué que cette expérience vise à encourager les Marocains à «  optimiser leur consommation d’électricité durant les mois de novembre et décembre 2022». Cette invitation à la modération électrique récompensée est justifiée. « La flambée des cours des matières premières énergétiques au niveau international a impacté à la hausse notre facture énergétique nationale qui dépend à plus de 90 % de l’importation des besoins énergétiques, malgré les capacités de production en renouvelables entrées en service ces dernières années », selon le communiqué du département de Mme Benali qui indique qu’une  économie de 5%  sur la consommation à l’échelle nationale qui est de 5,5 TWh durant les  mois de novembre-décembre 2021 permettrait d’économiser la consommation en énergie d’une ville comme Tanger pendant les deux mois en question.

Gestes d’efficacité

Les observateurs avisés ont du mal à saisir l’intérêt réel de cette mesure qui laisse croire à la nécessité d’engager une chasse au gaspillage énergétique. Personne n’a visiblement dit à Leïla Benali que les Marocains dans leur grande majorité ne sont pas energivoes. Contraints d’être économes, observant depuis longtemps les gestes d’efficacité électrique en raison de la cherté du prix de l’électricité qui passe chez Lydec à environ 1.100 DH dès que que l’usager quitte la première tranche pour la deuxième. Celle qui passe pour une experte internationale en matière d’énergie ne sait-elle pas que l’obstination des pouvoirs publics à maintenir l’heure d’été en hiver contre tout bon sens (scolaire, énergétique et sanitaire)  favorise par la force des choses une surconsommation d’énergie dans les foyers et en éclairage public le matin et le soir ? C’est ce qui explique certainement le pic de consommation pendant les mois de novembre et décembre !

Sobriété bien ordonnée commence par soi-même, à savoir l’État et ses différents services, bâtiments, collectivités territoriales, entreprises, institutions et organismes qui ne sont pas connus pour  être des champions de la modération énergétique dans tous ses aspects (consommation électrique, mobilité, etc). En fait, le ministère de la Transition énergétique et du Développement durable a raté une occasion pour  faire son travail dans les règles de l’art : Élaborer un véritable plan de sobriété énergétique multidimensionnel. Avec une partie  qui intègre des vraies mesures pour les Marocains (dans leur habitation, mobilité et factures) et une autre comportant des propositions fortes orientée vers les différents secteurs d’activité.

Avec un système bonus-malus écologique pour tous. Dans ce sens, il s’agit aussi d’identifier les gisements d’énergie secteur par secteur, filière par filière tout en construisant une vision claire pour l’avenir autour des énergies propres où,  en matière d’investissements, le Maroc a pris une longueur d’avance, mais reste curieusement à la traîne, côté mise en œuvre dans la vie de tous les jours. Dans le secteur stratégique et capital des énergies où le Maroc est plombée par la dépendance aux combustibles fossiles, le royaume a besoin aux commandes de lumières capables de réaliser la bascule en pesant sur le présent pour mieux éclairer l’avenir.

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